lundi 29 janvier 2018

En janvier, lis en jeunesse ce qu'il te plaît.

Je ne sais pas vous mais en Janvier je commence toujours des nouvelles lectures. En ce moment j'ai mis ( un peu ) de côté les polars pour regarder des plus près certains titres jeunesse. Je ne peux pas chroniquer tous les titres lus que  mais j'en ai sélectionnés trois qui m'ont particulièrement marquée, déboussolée et parfois même prise au dépourvue (sans la brise il fait trop froid).

Le premier titre Le soleil est pour toi m' a atterri dans les mains par hasard. J'ai l'habitude de lire ce que mes piou-pious ne vont pas lire spontanément. Et là tout était réuni : petits caractères, 500 pages en format poche et une couverture abstraite. La preuve: 
Au début de l'ouvrage, on plonge dans le quotidien de Noah et Jude jumeaux californiens de 13 ans. Très proches mais très différents à la fois : Noa est solitaire, adore communiquer avec les cailloux et semble attirer par le nouveau voisin. Jude, elle, est une explosion de joie et de bonheur. Populaire, belle et intelligente, tout lui semble facile. Mais la vie ne reste pas longtemps un long fleuve tranquille. Au fur et à mesure des chapitres polyphoniques, Les rôles semblent s'inverser. Et c'est la tragédie familiale qui semble en être le vecteur. Beaucoup de thèmes sont abordés : la découverte de la sexualité, les choix de vie, le droit d'aimer, le deuil, l'art. Bref difficile d'en dire plus sans spoiler si ce n' est que Jandy Nelson nous transporte dans un univers quotidien bourré de sensibilité et d'émotion. A mettre dans toutes les mains des "grands" qui penseraient que l'enfance est synonyme d'insouciance. Vous essuierez sûrement une petite larme.....

Dans un style plus fantaisiste, le nouveau roman de Marie Pavlenko : Je suis ton soleil. Un volume épais qui se lit en .... deux heures sans s'endormir ! La couverture coquillette m'a beaucoup intriguée.
Déborah a 17 ans. Elle ressemble à nos ados, à nos élèves, à nos enfants. Elle a tout de même une particularité c'est qu' elle se réfugie dans les livres. Aussi quand son père quitte le foyer familial pour refaire sa vie, ce sont les misérables d' Hugo qui lui tiennent compagnie. Elle se retrouve, seule, confrontée à la tristesse de sa mère. Et c'est là que toute la subtilité de Pavlenko se fait ressentir. Au delà d'une bonne dose d'humour et d'autodérision ( sans pour autant tomber dans le cliché des ados boutonneux mal dans leur peaux ! ), Déborah pose aux lecteurs des questions déroutantes. Quelle est la place d'une ado de 17 ans. Consoler sa mère ? Sortir sans culpabiliser ? En vouloir à un père absent qui essaie de se rattraper ? Comment être concentrée en classe lorsqu'une multitude de questions fourmillent dans votre esprit ? Peut-on s'autoriser un premier amour quand tout va mal à la maison ? Vous comprendrez aux dernières pages du titre pourquoi " Je suis ton soleil" est un hymne à la vie. Il est beaucoup plus difficile d'accepter ses faiblesses que de faire l'autruche et de continuer à vivre toute sa vie dans des névroses sclérosantes ! 

Allez un petit dernier qui commence à symboliser ENFIN la diversité des genres en littérature de jeunesse. Un petit bijou tant littéraire que sociétale.
Reagan a un lourd secret à porter. Son frère Liam chéri, beau comme un apollon et populaire à en faire baver le chef de l'équipe de baseball ne rêve que d'une chose : devenir une femme. Cette question délicate de la transsexualité et de la transition chez les adolescents est ici abordée sans tabou ni détour. 
Il était temps que les auteurs de jeunesse aborde enfin la question du genre. Liam est en réalité Luna et on assiste avec tendresse mais aussi douleur à ses premiers essayages de sous-vêtements, moquée par les vendeuses qui se rendent compte que cet excentrique ressemble davantage à un homme. 
Un gros big up à la figure paternelle. Il est totalement paumé. Il veut aller à la salle de muscu avec son fils, partager des "moments" entre hommes. Il se plante lamentablement alors qu'il est persuadé que son fils refuse ce genre d'activités  car il est homosexuel. Ce roman poignant est un vrai OVLNI : objet volant littéraire non identifié. Il permet de mieux comprendre cette réalité quasiment tabou de l' acceptation de soi qui vient bâcher les diktats de la société et les attendus parentaux. 

3 romans coup de poing, pas gnan-gnan, pas clichés, un peu bruts de décoffrage et ultra humains dans ses plus belles contradictions. 






dimanche 21 janvier 2018

Bulles et Papilles

Quoi de mieux que la découverte de deux mangas d'exception pour se mettre en appétit et plonger tel un bon ramen bouillant dans les délices japonais ? Il est vrai que notre voyage au pays du soleil levant cet été n'y a pas été pour rien dans ces deux choix de mangas.


17/19  volumes parus. Dispos dans toutes les biblis
 Le chef de Nobunaga est un manga qui mélange les genres.  Tout d'abord, une  bonne dose d'ingrédients historiques pour éveiller les papilles. Nous atterrissons directement  sous le régime féodal d' Oda Nobunaga au XVIième siècle. Ce guerrier (et donc samouraï) fut le premier des trois unificateurs du Japon. Il va goûter par hasard lors d'une escale dans une izayaki ( petite auberge à la bonne franquette japonaise ) à la cuisine de Ken. Ce dernier souffre d'amnésie, il ne sait plus qui il est d'où il vient mais dès qu'il a des poireaux, du miso et des champignons entre les doigts, il devient un cuistot hors paire. C'est à partir de ce moment là que l'intrigue débute véritablement. Sous peine de voir sa tête coupée ( et sûrement servie aux chiens royaux), Ken est obligé de quitter son Izayaki où il menait une petite vie tranquille pour s'installer au palais royal afin de devenir le cuisiner officiel de Nobunaga. Et toute la finesse du scénario est là. Nobunaga va se servir de la virtuosité de Ken et de son ingéniosité pour ravir ses visiteurs et ses adversaires. Comment la cuisine, la sélection  méticuleuse d'ingrédients et les préparations innovantes vont pouvoir servir le palais ( elle est bonne celle-ci ) ? C'est ce que vous découvrirez en avalant ce manga original qui a un succès fou au Japon. la saison 2 est en cours ! 


La cantine de minuit est un manga plus contemporain
plus urbain. Comme son titre l'indique, les tranches de vies qui nous sont présentées se dé-roulent telles des algues nori dans une douce atmosphère feutrée de la cantine de minuit dans le quartier de Shinjuku. Cette gargote n'a pas de nom mais les habitués s'y retrouvent de minuit jusqu'aux premières lueurs de l'aube. Une seule règle habite le lieu : le client commande mais c'est le cuisiner et propriétaire des lieux qui choisit le plat selon les ingrédients disponibles. 
Chaque plat est associé à un souvenir, un personnage, une situation, un choix. Une petite madeleine de Proust à chaque chapitre. Ce manga est construit comme une mini-série. Chaque petit chapitre présente des habitants du quartier, des gens de la vraie vie qui viennent trouver un peu de réconfort avec " le curry de la veille", des beignets de crevette au miso et quelques godets de Saké. Zola se serait volontiers installer au comptoir pour nous conter ces idylles improbables, ces amitiés impossibles et ces amours ravageurs. Loin des clichés d'une population lisse et homogène, la cantine de minuit accueille les confidences des flics, yakuzas, veuf/ves éploré(e)s, retraité(e)s alcooliques et même transsexuel(le)s et strip-teasers
A dévorer de toute urgence.