samedi 28 juillet 2018

à lire jusqu'au bout !

Un petit post un peu bordélique pour vous parler de mes dernières lectures.

À Montparnasse en attendant l'annonce de mon quai au début de mois de juillet je me suis laissée tenter par le dernier Paula Hawkins : au fond de l'eau
(J'avais trouvé La fille du train sympathique mais sans plus.)

J'ai trouvé beaucoup plus de points positifs à ce second roman. Tout d'abord l' ancrage de l'intrigue à Beckfort, le village d'enfance de 2 sœurs que tout semble opposer depuis leur enfance Julia et Nel. Beckford est un lieu maléfique, angoissant, quasiment surnaturel où l'on plonge avec délice. L'eau est partout : obsédante, sinueuse et attirante à la fois. Julia n' a pas parlé à sa sœur depuis plus de 15 ans. Mais là, elle n'a plus le choix, elle va être obligée de retourner la voir .... à la morgue ! Son corps a été retrouvé dans l'eau et le verdict est sans appel : suicide ! La question pour Julia sera donc de comprendre pourquoi ? Le second point fort de ce roman est sont point de vue féministe. Si vous aimez les femmes extra-lucides, celles que l'on n' écoute jamais marmonner, les sorcières, les diablesses du Moyen-âge, les insoumises et les intellectuelles oubliées par l'histoire et par les hommes..... Plongez !



Je me suis ensuite attaquée non pas à la serpillière mais à La serpe de Jaenada. 
Comme tous les livres sur-médiatisés, je me suis méfiée mais ai finalement été séduite par l'écriture et le style direct de Jaenada ainsi que par le fabuleux destin de Georges Arnaud, alias Henri Girard, accusé d' avoir trucidé 3 membres de sa famille. Bien qu'acquitté, le doute de son innocence subsistera jusqu'à sa mort. Il y a donc cette intrigue principale décrite avec minutie et précision ( il faut quand même se fader 643p pour arriver enfin aux remerciements ) mais surtout en arrière plan, le récit de Jaenada sur ...Jaenada lui même. Lui le parisien bobo écrivain père de famille qui quitte sa zone de confort pour se rendre un siècle plus tard sur la scène de crime. J'ai adoré son autodérision. Lui qui débarque dans la cambrousse profonde et qui n'ose pas prendre une bière avant midi, lui qui a peur d'être ridicule en demandant son chemin, lui qui achète des barres chocolatées régressives ( genre malteser et petite brique de jus de raisin ) à la station service. Jaenada nous livre également quelques moments de complicité partagée avec Catherine sa femme et son fils Ernest ; notamment celui de la prise de sa température ( je vous rassure pas avec une serpe ! ) avec un thermomètre. Un petit défaut, ce livre que je qualifierai de biographie historico-policière est un poil de cul trop long.



J' ai emprunté au hasard Rue des fantasques, un polar de André Blancédité chez Jigal Polar.


Une plume très fluide, assassine, avec du rythme et des personnages taillés au cutter.

Simple et efficace, une découverte sympa.



Toujours par hasard j'ai découvert également la plume d'olivier Adam à travers son roman à l'ouest.

On ne lâche pas le bouquin avant de l'avoir terminé. Tout est dans le titre. 3 vies 3 destins qui ne tiennent qu 'à un fil. Marie mère célibataire de famille & de faillite également qui fait tout pour joindre les 2 bouts et élever décemment ses enfants : Antoine 19 ans et Camille 11 ans. Antoine passe son temps à attendre que la vie passe, il est bouffé par le malheur, boit de la vodka au lieu de passer son bac et crame ses neurones dans le joint. Camille tente d'apaiser son frère et de calmer les angoisses de sa mère. Ce petit être si particulier lit en cachette la bible sous la couette pour prier le salut de sa famille et oublier la cruauté de ses « camarades » de classe. Tout cela va prendre fin car dans la vie on a toujours le choix.


J' ai fini la semaine en beauté en lisant les 4 tomes des Bidochon


Robert & Raymonde, ce couple si cliché et pourtant si vrai si sensible. On en prend tous pour notre grade : le mariage, la virilité, la réussite sociale, notre amour de l'argent et du paraître, notre peur géante de la mort et de l'abandon, la répartition des tâches domestiques, la peur du ridicule !


Vive les Bidochon!

dimanche 8 juillet 2018

collection été 2018

Vous aussi vous êtes collé-e-s à votre ventilateur ? Pour bien débuter ce premier mois de chaleur sans s'assécher le ciboulot, je vous propose quelques lectures 
( je suis à la bourre ) du mois de Juin. Prêt-e-s ? Transpirez !
Pour débuter, toi qui n' a pas encore lu Pierre Lemaître, cours tout de suite emprunter 
  •  Au Revoir là-haut.
 
 À force qu'on me tanne j'ai fini par le commencer dans le train et j'ai dévoré les 400 premières pages (enfin la moitié) sans même avoir l'idée de dépenser 3€ pour un café ! Tout le monde sait à peu près de quoi parle ce bouquin donc je ne m'étends pas mais Lemaître a une finesse dans la psychologie de ses personnages et une puissance pour nous faire entendre, goûter, voir, ressentir à la fois l'horreur de la 1GM mais aussi la douceur éternelle de la vie.

Une petite phrase qui m'a particulièrement marquée que je vous cite de mémoire. La guerre est finie. Albert est invité par la richissime famille d' Édouard, son ami rencontré sur le champ de bataille qui se fait passer pour mort. Lorsqu'Albert pénètre dans le hall d'entrée de l'hôtel particulier du parc Monceau, il rencontre la bonne  et se dit :
« Tout est beau chez les riches, même les pauvres ». J' en profite aussi pour faire la publicité de tous les polars de Pierre Lemaître.
J' ai adoré / dévoré ces 2 là :



  • Mon deuxième coup de cœur est un thriller Psychologique, un roman dont on a énormément entendu parlé. Il s'agit de
D' après une histoire vraie de Delphine de Vigan. 

Je suis sortie chamboulée de cette lecture car incapable de faire le tri entre ce qui relevait de la fiction et de l'autobiographie. 
De Vigan se met donc en scène dans cet écrit. Elle, l'écrivaine parisienne qui mène une vie paisible, souffre du syndrome de la page blanche. Un soir, lors d'une soirée arrosée chez des amis où elle ne se sent pas à l'aise, elle fait la connaissance de L. Cette rencontre, on le sent dès le début de la lecture, présage du pire. Une amitié va se lier? Une amitié toxique à esquiver ? Pas si simple. Vigan nous livre ses angoisses de femme, d'écrivaine et de mère vieillissante avec une véracité qui me fait dire que dans toute fiction, une part de vérité siège indéniablement. Je vous le conseille !

  • Un dernier coup de cœur que j'ai découvert grâce à ma voisine de ouigo ! Alors que je lui offre ma tarte aux pommes, elle me remercie en m'offrant son bouquin, qui m'assure-t-elle est passionnant. Il s'agit de
Tropique de la violence de Natacha Appanah.
Je ne suis pas surprise que le roman ait été récompensé par de multiples prix littéraires ( 13 au total ! ). Dès les premières lignes, le lecteur est embarqué à Mayotte. Bien loin du club med, on y découvre une jeunesse à l'abandon, qui crève la dalle et qui fait régner un climat de violence insoupçonnable. Le livre se découpe en plusieurs parties que vont se partager chaque narrateur. Tantôt Moïse, ce jeune adopté  qui ne trouve pas sa place sur cette île et qui va choisir sans vraiment la choisir la voie de la destruction, tantôt Marie sa mère adoptive, tantôt Bruce, cet ado à qui le directeur de l'école propose un enseignement adapté et qui devient chef de gang, tantôt Stéphane. Stéphane est français et choisi suite à sa passation de diplôme pour devenir responsable de projets humanitaires , de demander et d'obtenir sa mutation à Mayotte. Il nous fait part de son incapacité à aider ces jeunes sur le long terme. Oui il a ouvert une « petite maison de la jeunesse », oui il y a quelques livres et des projections de films en plein air. Mais personne n'est dupe. La France ne fait rien et laisse crever ses citoyens. Mayotte tout le monde s'en fout. C'est loin et puis y'a la mer donc bon ça doit pas être si pire. Stéphane est rongé de culpabilité, lui qui va rentrer en France les poches pleines de biftons et une exonération d'impôts. Moi non plus je ne fais rien pour eux et ce n'est pas en lisant ce bouquin que ça va changer grand chose mais je crois qu'il est temps d'ouvrir les yeux sur la responsabilité de notre pays et de faire découvrir cette dure réalité décrite par N Appanah au plus grand nombre. Vous ne le savez pas mais Gaza est le surnom donné par les habitants de Mayotte à leur île.....


  • Une collègue m'a prêté La tresse de Laetitia Colombani. 

3 destins de femmes 3 époques 3 histoires. L'une est indienne, l'autre américaine et la dernière italienne . Chacune de ces histoires se relient autour d'un fil que je vous laisse découvrir. Un très bon roman mais qui manque un peu d'envergure. Il aurait mérité d'être étoffé et je suis restée un petit peu sur ma faim.





  • Les deux derniers bouquins que j' ai un peu moins aimés.
Le potentiel érotique de ma femme, bien écrit mais je suis totalement passé à côté même si j'ai souri à de nombreuses reprises, cette histoire d'homme qui collectionne tout et n'importe quoi puis qui tombe amoureux.... bof bof

Un cri sous la glace est un polar suédois , ni bon ni mauvais mais ….Rafraîchissant tout de même ! 
 
Allez je me recolle au ventilo ! Bonnes lectures

dimanche 10 juin 2018

Nathalie, Lucile, Geneviève, Rebecca, Lisa, Catherine


Pour bien débuter le mois de Juin, une rapide présentation de mes lectures et de notre formidable rencontre avec Nathalie Stragier, auteure de la trilogie :

Une couverture peu aguicheuse à mon goût mais à force de voir mes élèves se l'arracher je finis par le lire. Et là surprise. Loin d'être un roman de chick lit à l'eau de rose, je découvre un roman d'anticipation....féministe ! Imaginez une fille du futur Pénélope ( qui vit en 2187 précisément ) et qui débarque aujourd'hui dans le lycée d' Andréa. Pénélope va découvrir avec stupeur et quelques tremblements les codes patriarcales qui règnent en maître aujourd'hui. Pour elle, notre monde est proche du Moyen-âge ( pourtant plus égalitaire qu'il n'y paraît ). C'est Andréa qui va recueillir cette énigmatique adolescente qui porte en elle un lourd secret digne de 1984 et du Meilleur des Mondes. Un mercredi aprèm, avec quelques élèves du club lecture, je débarque à la bibliothèque rue Crimée dans le 19ème. Il y a peu de monde, il fait chaud il est 14h30 et tout le monde a envie de rentrer chez soi ( surtout moi ! ). Mais on voit débarquer un petit bout de femme. Elle s' assoit en face de nous et déclare « c'est parti ! On se tutoie et on pose toutes les questions qui nous passent par la tête ». Mais c'est elle qui pose des questions. Pourquoi à votre avis Pénélope s'appelle Pénélope ?
Et oui, c'est un clin d’œil à la mythologie. Sacrée Pénélope, épouse et amoureuse d'Ulysse, qui pour rejeter toute une liste de prétendants à Ithaque ( pendant que son cher et tendre perce les yeux d'un cyclope) a une technique bien à elle. J' épouserai l'un d'entre vous lorsque ma broderie sera terminée ( broderie qu'elle découd toutes les nuits ). Bref, intéressant et judicieux. Nathalie explique qu'elle a écrit un livre qu'elle aurait aimé lire à son adolescence. Facile à lire, humoristique et féministe. La deuxième question qu'elle pose est : que pensez-vous de l'épilation ? Pensez vous que «  la vie soit trop courte pour s'épiler la chatte ? ». Mes élèves se retournent vers moi rouges comme des pivoines et me demande si je connaissais Nathalie Stragier avant de les emmener ici! Une main hésitante se lève. Une ado aux cheveux courts répond : oui je suis d'accord. Mais c'est tellement dur de ne pas faire comme les autres : tout le monde se fout de votre gueule au lycée si jamais on a 3 poils sous les bras ». Réponse de notre autrice : c'est vrai mais j'ai espoir que les choses changent. Je ne vous dis pas de ne pas vous épiler. Chacune fait ce qui lui plaît pour se faire emmerder le moins possible mais par pitié allez acheter vos rasoirs dans le rayon masculin où le même produit est vendu moitié prix. ». Une rencontre qui fait du bien. On attend avec impatience la parution de son nouveau roman pour septembre.





Une autre lecture que je ne peux que vous conseiller : 
Pourquoi les filles ont mal au ventre.
Cet album est un manifeste féministe accessible à tous les niveaux de lecteur-e-s et de lecture. Et non ! Vous n' entendrez pas parler de règles ou de sautes d'humeur mais de toutes les inégalités que subissent les femmes du monde entier. Ce sont elles qui débarassent, qui aident à cuisiner, qui font de la danse et pas du foot, qui doivent cacher leurs vergetures. La bichromie relève la subtilité des messages et des illustrations choisies ; la preuve :



Dans un genre plus documentaire j'ai dévoré l'ouvrage de Rebecca Solnit, essayiste américaine née dans les années 60. 
Elle explique avec beaucoup d'humour et de données chiffrées pourquoi les hommes expliquent aux femmes comment elles doivent s'y prendre dans tous les domaines.
Le premier chapitre est succulent. Elle rencontre un homme mondain et hautain ( cela va souvent de paire ) qui lui explique l'importance d'un ouvrage historique . Solnit n'arrive pas à s'exprimer ni à lui couper la parole pour lui donner son point de vue sur l'ouvrage en question et finit par lui clouer le bec : c'est moi qui en suis l'auteure ! Un langage clair et sans détour sur les thématiques sociales modernes. La fin de l'ouvrage rend hommage à Virginia Woolf . Je n'en dis pas plus.

Pour finir sur une touche polar, j'ai enfin lu un roman de Lisa Gardner dont j'avais beaucoup entendue parler. Il s'agit de famille parfaite
Cette famille ce sont les Dembe, tout droit sortie de Hystéria lane ( les housewife désespérantes ). Un vendredi soir, toute la famille est enlevée : Justin patron dans le BTP, Libby son épouse qui fabrique de beaux bijoux et leur adorable fille Ashlyn.
Tessa Leoni, ancienne policière reconvertie en détective privée, est employée par l'entreprise de Justin pour les retrouver vivants mais la demande de rançon tant attendue par les services de police tarde à arriver , ce qui n'est jamais bon signe. Les profils psychologiques des otages, surtout celui de Libby sont parfaitement bien maîtrisés jusqu'au moindres détails. Libby incarne cette génération de femmes qui entrent dans la cinquantaine remplie de doutes mais prêtent à tout pour rester la femme qu'elles ont envie de rester : libre et heureuse à la fois. J' ai toutefois été déçue par le dénouement. Mais une belle découverte tout de même !

Cette fois c'est la dernière, promis, une superbe découverte à offrir à nos ados, à toutes celles qui rêvent de reconversion professionnelle ou qui redoutent un burn out.


 Catherine Dufour nous émerveille. Chaque chapitre présente un métier improbable ou méconnu ou qui a la mauvaise réputation d'être inaccessible aux femmes.
Il se décompose toujours de la manière suivante :
On découvre le métier avec …... ( souvent dans les années 1800 ) et le métier d'aujourd'hui.
Cosmonaute, Pilote de ligne, aventurière, agent secrète, écrivaine, cheffe.... à la fin de chaque chapitre une liste bibliographique humoristique et documentée. 
Chapeau mesdames.

dimanche 13 mai 2018

Senses

Ami-e-s du soleil levant, foncez voir Senses. Prenez un copieux petit déjeuner à base de miso et hareng mariné, munissez-vous de votre serviette éponge et installez-vous confortablement dans un fauteuil défoncé de velours rouge pour vous rendre à une séance matinale dans un MK2 (pour la honteuse somme de 6€90).

 Senses n'est pas un film d'un format ordinaire. Il est découpé comme une série. Vous découvrirez donc Senses 1 & 2 lors de votre première séance (ce qui fait environ 2h30 d'où le nécessaire copieux petit-déj).

Regardez bien les horaires car il passe dans très peu de cinémas (et ne vous pointez pas à 10 h comme moi pour allez voir Sense 3&4 si vous n' avez pas vu les précédents).
Direction Kobé au centre du Japon où nous plongeons dans le quotidien hypnotisant de 4 jeunes Japonaises : Jun, Akari, Fumi et Sakurako. Cela débute par un pique-nique sous la pluie. Les onigiri et les mini-sandwichs sont savourés silencieusement entre deux gorgées de thé fumé. On s'y croirait. Derrière cet instant de bonheur partagé et de complicité, nous découvrons quatre profils très différents mais complémentaires au cœur de cette amitié : indépendante, soumise, timide ou entreprenante, chacune d'entre elles fait preuve de courage et de force pour tenter de s'affirmer face à des hommes , face à une société totalement patriarcale ou tout simplement face à leurs désirs propres plus ou moins facilement avouables. Sans vous dévoiler les différentes intrigues, J'ai tout de même ressenti un certain malaise concernant la place de la femme et ses droits. Comment concilier un désir de liberté et d'épanouissement avec le respect des coutumes traditionnelles encore bien ancrées au Japon ? Peut-on vraiment décider de la vie que l'on souhaite mener (au Japon comme en France d'ailleurs ?).
J'ai beaucoup apprécié les discussions inter-générationelles, mais plus encore les silences plus significatifs que les belles paroles. Loin des clichés, j'ai été surprise de la facilité avec laquelle Jun, Akari, Fumi et Sakurako se parlent. Sans détour, elles s'expriment peu mais de façon significative en prenant le temps de réfléchir aux mots prononcés. Elles organisent un week-end à Arima (petit village montagneux célèbre pour ses onsen : sources naturelles d'eaux chaudes où il est bon de s'y plonger nu) où leur confidences vont vous surprendre.
Des sentiments contradictoires et des équilibres nouveaux à trouver sont filmés avec beaucoup de délicatesse et de tendresse.
Hâte de voir la suite.

jeudi 10 mai 2018

Hommage aux femmes : cinq ans de métro.

Bonjour à tous,
Aujourd'hui je vous promets de faire court mais très intense. Je tiens à rendre hommage au superbe bouquin de Fred Alpi qui vient de paraître aux éditions Libertalia en ce joli mois de mai 2018 : Cinq ans de métro.
toutes les infos en lien ici
Dégustez-le, offrez-le, relisez-le. C'est un petit bijou musical, littéraire qui nous pète un peu au visage quant à sa cruauté sociale.
Vous avez peut être croisé Fred à la Parole Errante, à la Comédia, au CICP bref c'est quelqu'un de bon goût. En plus d'être hyper sympa, de savoir super bien jouer de la musique, de chanter en rythme dans les manifs (croyez-moi c'est loin d' être évident), M Alpi écrit vraiment bien. Son style urbain est naturel, jamais vulgaire et terriblement humain.
Ça va vous paraître peut être surfait mais j'ai décidé lire cinq ans de métro uniquement lorsque j'étais (allez je vous laisse deviner) dans le métro !
17 chapitres pour 17 trajets (souvent la ligne 3 pour moi) où Fred nous raconte son histoire, sans jamais se prendre au sérieux avec beaucoup d'humilité et de sensibilité. Après avoir démissionné d'une boîte de comm ( et de cons ) , Fred décide de descendre dans le métro pour y interpréter les grands classiques de la chanson française afin de pouvoir continuer de payer son loyer rue Tiquetonne. Son récit autobiographique date du début des années 90 mais tout y est encore d'actualité.
La vie qu'il mène dans le métro apparaît comme révélateur du monde aérien qui nous entoure et qui nous asphyxie toutes et tous , surtout à Paris je pense. L'état d'urgence déjà instauré , une présence policière violente omniprésente (pour soit disant sécuriser les réseaux), les fachos en tous genres, la drogue, la prostitution
Beaucoup d' évènements relatés m'ont bouleversée.

Le premier est sans contexte sa rencontre avec Michel. Il a pris la peine de lui serrer la main, d'en apprendre un peu plus sur lui sans jamais mettre le lecteur mal à l' aise et sans condescendance aucune.
Car oui j' ai honte mais je suis déjà sortie d'un wagon pour échapper à la puanteur d'un sdf pour monter dans un autre wagon. Première rencontre déterminante avec Michel p.83 dont voici un court extrait :
«  Moi c'est Michel […..] J'ai l'impression q'les gens y'me voient même pas. Et ça fait longtemps que j'ai pas serré la main de quelqu'un.

- Ils ont peur, ou savent pas quoi dire ; Et puis, ils se parlent pas entre eux non plus, hein. Le métro c'est pas vraiment un endroit où on se fait facilement des copains. ».

La deuxième chose qui m'a énormément plu, c'est la dimension féministe de cette autobiographie.
kombini : vers une sensibilisation ?
Le manspreading, le harcèlement dans le métro ou au travail sont des formes de violences endémiques que nos politicards s'empressent de s'octroyer en créant des ministères en tous genres. Marlène Schiappa va te p***** toi qui intègre un gouvernement qui en ce moment même débat sur l'âge de non consentement en cas de viol (justice en carton bonjour) car non pour ma part il ne devrait jamais y avoir aucune limite d'âge en matière de viol.

Fred explique avec justesse et justice que les hommes sont violents (et l'ont toujours été) avec les femmes. Beaucoup insultent et se frottent aux gambettes des jeunes demoiselles tandis que lorsqu' une jambe poilue les effleurent, ils s'offusquent en prenant un air dégoûté. Fred a déjà arrêté de chanter dans le métro lorsqu'il assiste à ce genre de scène. C'est très loin d' être un exploit partagé, cela devrait être normal selon lui et selon moi.
Il a lui aussi été considéré comme un objet sexuel dans le métro et l'a très mal vécu. Alors qu'un homme lui fait des avances sexuelles insistantes, F.Alpi fait comme toutes les femmes qui se font emmerder dans le métro, Il détourne la tête en espérant que l'individu lui lâche la grappe, cesse de respirer et il regarde ses pieds en espérant que ce trou du fion descende avant lui. Cela fait bizarre de lire cela de la plume d'un homme... car il n'écrit pas cela pour se plaindre de sa condition d'homme malmené à occasion unique, il écrit cela en hommage-témoignage en expliquant qu'il ne sait pas comment les femmes font pour supporter cela quotidiennement et que c'est de son devoir d'agir.
Merci de prendre la mesure de l'enfer que nous vivons chaque jour dans le métro.
Merci d'avoir le courage de s'interposer, de parler de réagir et de ne pas nous laisser dans la m***. Comme dans tous les systèmes patriarcats, ce sont les femmes qui sont touchées en premier par ces violences. 
Grâce à ce bouquin, je ne regarderai plus jamais de la même façon cette vie souterraine à laquelle j'assiste impuissante depuis 10 ans et où je vois défiler toute la misère humaine. Un changement de regard, juste un bonjour un sourire. Et c'est clair que dès que j'entends du Brassens ou du Django dans le métro ou ailleurs je n'hésite pas une seconde à donner une petite pièce. Je ne me leurre pas. Quand je donne deux euros à un migrant ou un marginal, c'est surtout pour soulager ma culpabilité de ne rien faire pour eux.

mercredi 2 mai 2018

Lectures en tous genre du joli mois d'Avril

Bonjour à tous
Pour honorer le retour du dieu soleil (le seul et unique existant que je vénère ) , et rattraper mon retard lunaire dans mes chroniques , je présente ce soir un joyeux bordel dans mes lectures jeunesse polar et même feel good. Ce dernier est un genre souvent dénigré par les supers chroniqueurs du masque mais comme déjà dit précédemment,  ils n' ont qu'à se la mettre bien profondément là où je pense.
Pour débuter un polar coréen emprunté par hasard à la bib : Sept yeux de chats. Cela débute à la manière des 10 petits nègres.  Six personnes tous âges et classes sociales confondus se retrouvent dans un petit chalet isolé de montagne. Le seul lien qui les unit est leur passion pour les grands psychopathes criminels et leur amour pour les polars. C' est bien là le génie de l auteur. Une fois l intrigue installée dans ce huit-clos angoissant , l auteur brouille les pistes. On ne sait plus vraiment qui est mort ? Qui incarne la raison ? Qui a de bonnes raisons de vouloir  réunir ces personnes en apparence communes et banales? . Ce polar est déroutant car chaque chapitre apporte sa dose de logique dans le raisonnement policier mais à la fois sa dose de folie et de cynisme concernant la nature cupide de l' homme avec un grand hache . Un roman malaisant qui flirte avec le genre gore surnaturel et …..horrible à la fois. 
Âme sensible s abstenir !!
Pour faire passer la croquette, deux romans feel-good qui font du bien au moral . J ai découvert Gilles Legardinier et je vous entends déjà râler ! Merci la littérature de gare c est pire que Musso. C est de la pâté pour chihuahua.  Petit un vous n'avez probablement jamais lu Musso ( moi si et c est un auteur qui a le mérite d être proche de ses lecteurs sans se prendre pour un Lacan Deleuze en puissance ). Petit deux la probabilité que vous ayez déjà goûté la nourriture de votre animal imaginaire est quasi nulle alors laissez tomber vos préjugés.  J ai tout bonnement adoré Complètement cramé . Déjà parce que le chat de la couverture nous offre une magnifique transition animale et a une grande importance dans le roman. Legardinier aborde un sujet doux et sensible. La vieillesse solitaire d'un homme d'affaire qui ne s'est jamais remis de la mort de son épouse. Ok jusque là ça peut faire chiant sauf que notre Andrew Blake décide de léguer la direction de son entreprise à sa secrétaire, de mettre un slip et une chemise blanche dans sa valise et de partir incognito au service d'une vielle femme en tant que majordome. Je ne sais pas ce que j’ai préféré entre l humour pince sans rire d’Andrew , les amitiés fragiles qui se nouent entre les membres du personnel ou la réflexion profonde sur le bonheur et le temps qui passe.  Je suis capable de lire les pires romans d angoisse sans ciller mais j'ai écrasé une larme à la fin de Complètement cramé car la relation dépeinte entre le père et sa fille est loin d'être exceptionnelle mais communément partagée par beaucoup d'entre nous.

J’ ai aussi dégusté Le restaurant de l'amour retrouvé d' Ogawa Ito. La plume bien particulière de l auteur nous emmène vers un véritable retour au source, lentement mais pas trop vite!  
 Rinto a tout perdu du jour au lendemain. Son fiancé indien a quitté l appartement en emportant absolument TOUT, même ses précieux ustensiles de cuisine. Heureusement, la jarre à saumure de sa grand-mère est toujours là. Rinco dépense ses derniers Yens pour retourner dans son village d'enfance, perdu dans la montagne. Elle y retrouve sa mère avec qui elle a du mal à communiquer, sans compter que sous le choc de sa rupture Rinco a perdu sa voix ( et promis elle n' a pas de chat dans la gorge). Elle va retaper l'arrière boutique du bar tenu par sa mère pour en faire un restaurant particulier. Je vous laisse savourer, sur fond gastronomique, cette réflexion profonde sur les relations mère-fille qui peuvent aussi finir bien.
Pour clôturer avec les romans, celui que l'on m' a prêté et qui m'est tombé des mains.... : l'amie prodigieuse. C'est bien écris mais c'est franchement trop académique et ça manque de lâcher prise . Je n' ai pas du tout envie de continuer la suite . Je ne comprends vraiment pas pourquoi tout le monde en chie une pendule.

Concernant les Bandes Dessinées, jetez-vous sur les 4 tomes des vieux fourneaux. 
Le tome 1 ( le plus abouti à mon avis ) est excellentissime. Imaginez une bande de retraités anarchistes et 68tards qui se retrouvent pour enterrer un des leurs à la campagne. Leur devise : ni Yeux ni maîtres
  Je n' en dis pas plus mais  c'est drôle, cinglant, rempli d'humour noir tout en étant sensible et doux à la fois.  J' ai aussi lu le premier tintin de toute  ma vie : Tintin au Tibet. Et je me suis dis : ouah qu'est ce que c'est bien écrit. Je compte bien continuer ( sauf celui au Congo ). 

Trois  petits albums qui font du bien  Momo,  Clémence évidence et Verte ( le fameux bouquin de Desplechin adapté ). Des visions enfantines mais matures sur le monde environnant, l'amitié, l'angoisse de la mort. Trois  bouquins à offrir à des grands CE2/1CM1/2 et même des adultes qui ne veulent pas perdre leur âme d'enfant: 

 J' en ai lus d'autres mais pour avoir une chance d'être lue jusqu'au bout, je m'arrête !  
Bonzaï







dimanche 8 avril 2018

Ceija Stojka à la Maison Rouge.

C'est un jeudi après-midi pluvieux. Il est 14h40 et aujourd'hui c'est décidé je m'enfuis du collège.
- " Bah dis donc Georgette ! tu rentres déjà ? tu restes pas pour le conseil péda ?
- Bah non tu vois je suis une feignasse qui sort à la fin de sa dernière heure de cours comme tous profs qui se respectent. D'ailleurs moi je te demande des comptes sur ton p**** d'emploi du temps d'agrégé !!!"
Bien évidemment je n'ai pas répondu ça. ça ressemblait plutôt à 
" à demain ! bonne soirée je vais me faire une expo " .... dont on m'a parlé comme toute petite bobo gauchiste prof et privilégiée par son statut de fonctionnaire très souvent gréviste 
( qui plus est provinciale bouh les parisiens disent que nous sommes les pires ! ) Bref en allant à la Maison Rouge je ne savais pas à quoi m'attendre juste que ça risquait de me retourner les tripes. J' ai eu la chance de me greffer à une visite guidée par l'exceptionnelle médiatrice que je tiens à remercier Elora Weil-Engerer. Elle a sublimé cette exposition hors du commun.

Fait remarquable, parmi les visiteurs il n'y avait  que des femmes. Le vigile en riant  me dit  : " C'est vrai vous avez raison  il n' y a  presque que des femmes qui viennent admirer le travail de Ceija( prononcez Chaya ). Et puis c'est surtout à cause de la deuxième expo sur les poupées ! "

Le cadre est posé. Un historique sur les racines roms des roms et des tziganes nous accueillent. On en a tous bien besoin de s'intéresser à eux enfin, à leur histoire, leur culture, leur manière de vivre.
Les peintures de style naïf de Ceija Stojka sont époustouflantes de réalisme et de cruauté. 

 Cette combattante née à Vienne en 1933 fut déportée à 10 ans avec toute sa famille. Loin des livres d'histoire, le destin de ce génocide oublié : celui des roms et des tziganes. Ce traumatisme de la déportation, Ceija en est ressortie miraculeusement vivante non pas une ni deux mais trois fois. Regardez bien le symbole nazi dans les veine de la cornée de cet oeil ( de Moscou ?) ou encore ce tatouage ignoble Z comme Zigeuner, tzigane en allemand que Ceija porte sur le bras gauche. Sans parler des corbeaux grouillant dans le ciel tel des insectes  qui sont les seuls êtres vivants venant  contrecarrer la pureté de ce ciel bleu.

En 1945, 90 % de la population rom a été exterminée. Le statut de génocide fut reconnu très tard 
( trop tard ) car pendant un demi siècle, on considérait encore les roms comme des criminels et non pas comme des êtres humains.

Ce n'est qu' à l'âge de 55 ans, que Ceija sort du silence. Tel un jet d'immondices qui débordent d'une poubelle, elle peint, dessine, écrit. De gros aplats de couleurs vives, des paillettes, des perles et du sable multicolore viennent accrocher notre regard.  Des roulottes ?  oui mais là encore. Prenons de la distance avec nos préjugés. Comme l' explique notre guide, il y a très peu de roms itinérants. Ceija fait exception car sa famille vendait des chevaux. Ils étaient donc au 3/4 de l' année sur les routes.
Les cieux dépeints par l'artiste sont toujours lumineux, envoutants. Ils viennent se frotter aux motifs parfois naïfs, quasi enfantins des souvenirs traumatiques de l'artiste. J'apprends ainsi que dans la culture rom, on ne parle pas des morts ni des deuils. Le silence est d'or, on ne se recueille pas sur les tombes mais le recueillement se fait par les chants et le port de couleurs vives. Ce qui pourrait expliquer que le témoignage de Ceija ait agi comme une véritable bombe à retardement. Elle qui s'est réchauffée sous des cadavres en putréfaction, certaines de ces œuvres font encore aujourd'hui polémiques. Ce petit train sorti de son imaginaire semble constituer l'illustration un conte de fée malgré la bannière nazie. Ceija a 10 ans lorsqu'elle est déportée pour la première fois et l' on pense aujourd'hui que c'est de manière totalement volontaire qu'elle a adopté ce style onirique qui multiplie par 100 le sentiment de malaise lorsque l'on se tient face à la toile.

Regardez ces tournesols. Van-Gogh peut aller se rhabiller. !
Les dessins en noir et blanc sont à couper le souffle et se passent de commentaires. à vous de juger


regardez bien la brindille : ode à la vie
 à la fin de l'exposition, un petit autel  avec une vierge est présent. Moi qui suis plutôt athée j'ai ressenti une forte émotion à la vue de ce symbole.

 Ce n'est pas un cliché, les populations roms sont extrêmement croyantes. Si Ceija a survécu c'est grâce à deux choses selon elle : 
- sa foi en la vierge 
- la sève du petit bout de bois ( récupéré en cachette ) qu'elle a avalée. 
Cette petite brindille de rien du tout lui a sauvé la vie en l'empêchant de mourir de faim. Regardez bien en bas à droite de chaque tableau , on retrouve cette brindille qui souligne délicatement sa signature. Ceija peignait à mains nues, sur la table de sa cuisine. 
Elle qui n' avait jamais mis un pied dans un musée, elle a toute sa place à la Maison Rouge et on l'espère pour elle au Paradis Blanc auquel elle a tant cru. 
Vous avez jusqu'au 20 mai pour vous faire votre propre opinion.

lundi 26 mars 2018

Hommage aux femme japonaises

Vous partez bientôt au Japon ou vous rêvez de le faire ? Qu'importe. Courez chez votre libraire pour vous procurer cette pépite écrite par Julie Otsuka, Certaines n'avaient jamais vu la mer, publiée chez 10/18.
Un roman incisif quasi incantatoire d'une beauté profonde et écrit d'une plume de velours avec une pointe en acier trempé ! 

Julie  Otsuka nous raconte le calvaire traversé par les émigrées nippones au XXème siècle, dans l'entre-deux-guerres, qui vinrent s'installer en Californie. Ces héroïnes anonymes embarquent dans les cales d'immenses navires avec au tour du cou, un médaillon qui renferme la photographie de leurs futurs maris, des compatriotes déjà installés aux États-Unis. La transaction se décide via une marieuse .  Ces jeunes femmes sont fières d'avoir accompli leur devoir en échange d'une somme d'argent que l'on peut  imaginer assez modeste.
Le premier chapitre s'ouvre sur un guide de bienvenue " Bienvenue mesdemoiselles japonaises". Une tension est palpable : toutes sont vierges et aucune n'a vécu loin de sa famille, certaines combattent la fièvre, d'autres délirent enivrées par leurs propres odeurs d'excréments.
 Pourtant elles tiennent bon. Elles ont envie de croire à une vie meilleure. Les conseils des mères raisonnent dans chaque tête " sois présente mais ne te fais pas remarquer", 
" obéis à ton mari", "les femmes sont faibles mais les mères sont fortes". Chacune des futures mariées a soigneusement plié dans son sac de toile: un kimono de soie blanche pour le jour des noces, des bâtons de calligraphie et un petit bouddha pour vénérer les dieux. Pour tromper la peur et l'ennui des 4 quatre semaines de traversée, Otsuka se fait l'écho des questions qui assaillent les jeunes filles.
Il paraît que les américains rentrent avec leurs chaussures ? 
Il paraît que les jonquilles tapissent le fond des jardins ? 
Mon mari est banquier ! Nous allons avoir une piscine ! 

Dans les chapitres suivants c'est littéralement la descente aux enfers. La première nuit sera synonyme de violence sexuelle " mon vagin a failli éclater". 
La plume d'Otsuka oscille entre la délicatesse des mœurs et coutumes de ces jeunes femmes naïves pour la plupart et l' horreur et la cruauté des hommes blancs et de leurs maris, eux mêmes devenus esclaves de cette ( soit-disant ) terre d'accueil.  
Le récit est  très court.  Otsuka réussit à trouver le juste mot pour décrire la famine, l'esclavage, les viols quotidiens des maris, le travail harassant dans les champs, l' exploitation agricole et sexuelle, la misère des enfants nés dans les champs que l' on nourrit difficilement entre deux récoltes. 
C'est la première fois que je lis un roman écrit à la première personne du pluriel. Ce Nous, ce sont ces femmes  à la fois fragiles, trompées mais en même temps ce  Nous est à la fois puissant et organique, tel le roseau qui ploie mais qui ne cède pas.
Le destin de ces milliers de femmes n'apparaît nul part dans les livres d'histoire. Ces femmes ont subi une double peine : la dictature de l'homme blanc américain qui exploitait leurs maris ( et donc elles aussi ) mais aussi le patriarcat qui régnait en maître dans les familles constituées par ces mariages forcés. Une organisation patriarcale que l' on retrouvait bien évidemment dans de nombreux pays européens
En voici une claire description :
Les femmes mangent après les hommes,  n'ont pas le droit de se coucher avant leurs maris et n'ont pas le droit de dormir dans leurs lits. Alors oui les sushis, rue st Anne, les fleurs de cerisier et les kimonos c'est super chouette mais connaître la sombre histoire qu'un pays a traversée, surtout lorsqu' elle est oubliée c'est encore mieux. Ces femmes ont aussi subi le regard souvent gêné de leurs propres enfants : " maman ! arrête de t'incliner ! " " maman, j' en ai marre de manger du riz et du miso : je préfère du ketchup et des pâtes". Comment alors trouver un sens à sa vie lorsque le pays qui aurait dû nous accueillir bafoue une culture ancestrale, celle du thé, du pliage et de la calligraphie ?



Lorsque le Japon déclara la guerre aux États-Unis, les immigrés japonais furent internés dans des camps. Nous ne savons pas ce que sont devenues ces familles. Mais le dernier chapitre est écrit du point de vue  des américains qui ont vécu avec eux. Les voisins, les amis, et même les camardes de classes. Ils se questionnent, s'inquiètent au début puis commencent à s'en vouloir. Peu à peu les souvenirs disparaissent et bientôt il n'y a déjà plus aucune traces de ces japonais en Californie. 
Comment s' appelaient - ils déjà ? .....

mardi 20 mars 2018

Des littératures pour voyager

Aujourd'hui, je vous présente deux romans coup de cœur que j' ai littérairement dévorés.

Le premier m' a été offert par une lectrice aguerrie que je remercie encore une fois vivement pour ce présent.
Il s' agit du chant des pistes de Bruce Chatwin, édité d'abord chez Grasset  en 2013  dans la collection Les carnets rouges, mais que vous trouverez également en poche ( un gros pavé tout de même).

Chatwin est cet écrivain voyageur, humble et poétique qui nous transporte en Australie. Il va suivre pendant quelques mois des sentiers poussiéreux et sinueux à la recherche du " chant des pistes" ou "songline". Ce serait selon la tradition aborigène le chemin de la terre, l'essence même du cosmos dans lequel l'humanité toute entière prend racine. Chatwin sépare son ouvrage en deux parties. 

Dans la première, notre aventurier anglais part à la rencontre des aborigènes et des habitants de lieux souvent tombés volontairement dans l' oubli. Une bière fraîche, un rocking-chair, un premier contact et Twain engage la conversation. Curieux mais jamais intéressé, il n' essaie pas d'imposer son point de vue européen ou ses coutumes occidentales car il a honte. Honte des violences coloniales et des massacres perpétrés par les anglais.  C'est donc un formidable ode à la vie, à la magie des légendes aborigènes et au voyage tant mystique que physique que nous livre ici Chatwin. 
La seconde partie se présente sous forme de petites anecdotes, de compilations philosophiques issues de ses anciens carnets de voyage . J'ai particulièrement apprécié les annotations de Chatwin sur sa condition d'homme blanc, élevé dans la tradition chrétienne qui se retrouve confronté à une autre manière de voir le ciel, le monde, les étoiles. Un très bel ouvrage à offrir de toute urgence aux amoureux du pays des kangourous, du kiwi et de la littérature de voyage.


Le second ouvrage qui m'a fait voyager est un polar recommandé par une amie qui publie sur  la page facebook Des livres Rances que je vous recommande chaudement en cliquant ici pour leur souhaiter une longue vie.
Il s'agit d'un  bon polar de Wiliam G. Tapply : dérive sanglante édité en 2007 chez Gallmeister. Ce prof de littérature, passionné de pêche, nous embarque dans le Maine, la région extrême nord-est des états-Unis.
On y respire l'odeur des plaines, on entend le clapotis des truites sauvages, on en vient même à sentir les aiguilles de pins frotter sous nos semelles de randonnée. Le lecteur fait très vite la connaissance de Stoney Calhoun, un être solitaire qui vit en ermite avec son cabot dans une petite cabane en bois. Sa passion vous l' aurez deviné :  la pêche, c'est pourquoi il réussit à se faire embaucher par Kate ( mon personnage préféré, une amazone ! ) jeune femme au caractère bien trempé qui tente de faire marcher son petit commerce dans le monde impitoyablement masculin qu'est celui de la pêche. Le passé douloureux de Calhoun se dévoile au fil des pages. C'est un amoureux des choses simples et des soirées à lire une énorme anthologie de la littérature américaine. Calhoun est amnésique suite à un grave accident dont il ne conserve aucun souvenir. Il souffre de certaines séquelles, notamment d'hallucinations visuelles plus que dérangeantes... Tout va basculer lorsque Lyle, son collègue et unique ami un peu hippie sur les bords se fait  assassiner... Je n'en dit pas plus mais ce qui est sûr c'est que vous aurez sans doute envie de découvrir la suite. L'auteur distille au compte-goutte mais avec ingéniosité des indices croustillants qui donne envie de suivre Calhoun dans ses prochaines aventures. Pour l' ambiance feutrée et la qualité des descriptions des paysages, je hisse dérive sanglante quasiment au même rang que  l'île des chasseurs d'oiseaux de Peter May

Bonne lecture sous la neige !